Olivier Babin   Du 10/01/2002 au 15/02/2002

Straight Stories

C’est la première des 160 photographies présentées qui donne son titre à l’exposition : sur un écran de cinéma, dans un film de David Lynch, debout sur une route, un viellard contemple au bout de sa santiag un daim percuté par une voiture. L’image est très grande, très lumineuse et semble sortir du mur. Formellement, elle est écran de cinéma. Mais en poussant l’analogie formelle jusqu’à l’identité, on a fait voler en éclats l’analogie matérielle : la matière lumineuse obtenue n’est ni celle du cinéma ni celle de la photographie, mais celle de la peinture. Il n’y a pas de reproduction mais métamorphose ou transfiguration.
Suivent quatre grandes photographies en noir & blanc et sans titre, réalisées à partir d’images vidéo dont la trame a disparu et que l’obscurité a envahies; d’extraction vulgaire (série B ou X) elles installent pourtant une mystérieuse dramaturgie : le désir tourmente les corps, des éléphants marchent sur la ville.
Une semblable volonté d’éreintement du réel prévaut dans la série titrée Guns Shrine State, réalisée en février 2001 en Floride. On a appliqué à la photographie de paysage ce mot de Henri Michaux selon lequel « New-York vu par un chien doit se baisser ». L’acte photographique est à penser comme violence qui se déchaîne d’abord contre les clichés.
Mais, signe des temps, si la photographie est guerre contre la ressemblance et la vraisemblance, elle est aussi plan de paix : construction (et non reconstruction) d’un espace et d’un temps, immenses et sans hostilité. Ainsi [1001] Night Years (from home), voyage nocturne et abstrait en 1001 polaroïds grattés (dont 143 sont montrés), met en lumière le caractère essentiellement fictionnel ou démiurgique de la photographie. Mais, performance dans son processus, fossile dans son produit, elle n’a de sens que dans la réitération permanente.
Tirage et grattage : on redouble de malchance.

Il a été présenté par Eric Troncy, directeur du Consortium de Dijon.

Oeuvres sélectionnées

Biographie

Olivier Babin est né en 1975, il vit et travaille à Paris.
Maîtrise de philosophie à Dijon.